dimanche 4 décembre 2016

Eloge du compositeur Antoine Taudou en 1870

Antoine Taudou, né en 1846 à Perpignan, n'est en 1870 encore qu'un jeune violoniste et compositeur. Grand prix de Rome de composition musicale en 1869, il commence à se faire un nom, à la fois en tant qu'interprète et comme compositeur de ses premières œuvres.

Musicam scire
Antoine Taudou en 1903


Le journal Le Roussillon du 25 mai 1870 retranscrit son éloge, tel que paru dans un autre journal de l'époque, Le Français. On y trouve la mention de quelques unes de ses œuvres de jeunesse, information utile tant les sources sont rares pour ce compositeur oublié de nos jours et dont à ma connaissance il n'existe pas d'enregistrements (du moins n'en ai-je pas trouvé). Sans doute ses compositions assez conventionnelles suscitent-elles désormais moins d'intérêt, et Antoine Taudou est plutôt encore connu comme ayant été le professeur d'harmonie au conservatoire de Paris d'élèves devenus célèbres, parmi lesquels notamment Charles Koechlin.

Le Français publie l'article suivant sur un de nos compatriotes, M. Taudou.
« Agé de vingt-trois ans à peine, M. Taudou a déjà vu son mérite comme violoniste et comme compositeur constaté cinq fois par le conservateur qui, au dernier concours, lui a décerné le grand prix de Rome. Son habileté comme virtuose s'est révélée dans l'exécution de la sonate en la  de Rubinstein, et le style pur et élégant qu'il a montré dans l'interprétation du cinquième quatuor de Beethoven, lui ont valu des félicitations du public intelligent et connaisseur réuni pour l'entendre ; elles lui ont valu celles plus flateuses encore des artistes éminents qui l'entouraient. En voyant Mme Massart, MM. Rubinstein et Jacquard prêter leur concours à M. Taudou, on était assuré de son avenir.
« Ses compositions sont claires, faciles à comprendre, pleines de grâce et de charme, ont séduit l'auditoire tout entier, et cette fois, par une exception qui ne se renouvellera peut-être pas, les amateurs craintifs ont applaudi spontanément sans jeter un regard furtif sur des mains plus autorisées. D'abord, c'était une « mélodie » pénétrante empreinte de la plus rare distinction parfaitement chantée par M. Bouhy, puis une barcarolle dont le rhythme s'alliait heureusement à quelques strophes de Victor Hugo, et enfin trois morceaux de violon exécutés par l'auteur.
« L'adagio a obtenu les suffrages de l'estrade les plus précieux, on le sait ; la « Napolitaine » souvenir du récent voyage de M. Taudou en Italie, a été dite avec verve et brio. Mais ce que personne n'oubliera, c'est la « chanson » dont le tour imprévu rappelle ces « Lieders » de Heine, où l'esprit et la finesse n'excluent pas un sentiment tendre à peine indiqué et aussitôt remplacé par une note railleuse. Cette « chanson » est un petit poème et résume le talent de M. Taudou, talent qui nous promet pour l'avenir un compositeur destiné à figurer parmi les artistes d'élite résolus à conserver les saines traditions de l'art et à chercher leur idéal dans ce qu'il y a de plus pur et de plus élevé.

G. Huber. »


Si l'on tente de résumer les œuvres composées  par Antoine Taudou mentionnées dans cet article nous avons donc :
* deux pièces chantées : une mélodie et une barcarolle sur des vers de Victor Hugo ;
* trois pièces pour violon : un adagio, une « Napolitaine » et une « chanson ».
Concernant la mélodie, l'article mentionne le chanteur, M. Bouhy. S'il s'agit de Jacques Bouhy, chanteur en vogue à l'époque, sans doute est-ce donc une pièce pour baryton.

Précisons enfin qu'un des soutiens cités dans l'article n'est autre qu'Anton Rubinstein, grand pianiste et compositeur russe, à l'époque en tournée dans toute l'Europe.

Source : Le Roussillon du 25 mai 1870 [domaine public], via le fonds numérisé de la Médiathèque de Perpignan.
Photo : Portrait d'Antoine Taudou par Pierre Petit dans la revue Musica en 1903 [domaine public]



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